yasmiine mouss قلم من ذهب
عدد المساهمات : 174 نقاط المشاركات : 241 تاريخ التسجيل : 10/10/2011 العمر : 30 الموقع : www.facebook.com/yasmiine.mouss
| موضوع: Et maintenant, une nouvelle الأربعاء أكتوبر 19, 2011 6:05 pm | |
| Voila une nouvelle que j'ai écrite pour un devoir de français. Il fallait choisir un tableau d'Edward Hopper et écrire quelques pages de roman à ce sujet... Moi, j'ai fait une nouvelle pour qu'il y ait un début, un milieu et une fin. J'aime pas écrire juste un petit bout de texte perdu qui sert à rien ^^ ... La Croisée des Chemins Il faisait noir. J'avais toujours détesté le noir. Mais depuis que maman était morte, l'obscurité m'inspirait une terreur profonde et inavouée, une peur qui s'insinuait en moi par chaque pore de ma peau pour me toucher directement au cœur. Maman. Si forte, si fière, et pourtant si faible. Face à la maladie, elle s'était inclinée, résolue. Vaincue par la mort, dans le combat éternel qu'elle mène contre la vie. Mais l'issue de l'affrontement était survenue trop tôt, emportant ma mère en me laissant derrière elle, moi, son fils unique de quinze ans qui l'avait toujours adorée. Je m'appelais Mathéo. Enfin, je m'étais appelé. Aujourd'hui, je ne savais plus qui j'étais, ni même si j'avais jamais existé. Mon semblant de vie était dépourvu de la moindre touche de couleur, de la moindre joie, de la moindre chaleur. Mon seul refuge, mon dernier havre de paix se situait dans l'inconscience. Il faisait noir, donc, mis à part le petit point lumineux issu d'une ampoule de guirlande qui me servait de veilleuse. La faible lumière éclairait à peine suffisamment pour que je puisse distinguer le pied de mon lit et ma table de chevet, sur laquelle était posée une tasse vide. Les murs de ma chambre restaient dans l'ombre, si bien que j'avais la sensation d'être coupé du monde, seul sur mon lit comme un naufragé sur son radeau. J'aurais été incapable de dormir dans l'obscurité complète. Il faisait froid. Je remontai mes couvertures jusqu'à mon menton, mais la laine ne parvenait pas à réchauffer mon corps meurtri. Je n'aspirais qu'à m'enfoncer dans les brumes du sommeil, pour oublier ma peine et ma douleur. Le goût amer de l'infusion agitait encore mes papilles, et ses effets commençaient déjà à se faire sentir. Une onde de chaleur envahit mon corps, des gouttes de transpiration perlant à mon front. Ma conscience torturée se relâcha progressivement, soumise, et je me sentis glisser vers de profondeurs obscures et inconnues. Le point lumineux de la guirlande sembla clignoter à travers ma vision brouillée, gagnant en intensité, comme pour m'attirer à lui. Luttant pour rester dans la noirceur de l'inconscience, je me débattis dans mes draps trempés de sueur. Mais je dus bientôt admettre qu'une telle humidité dépassait les limites du possible dans une chambre. Etais-je toujours dans ma chambre ? J'avais l'impression de tremper de la tête aux pieds dans un bassin d'eau froide, avec pour seul flotteur cet objet lisse sur lequel mes doigts cherchaient vainement une prise. Soudain, une gerbe d'eau glacée m'aspergea le dessus du crâne, m'immergeant et me faisant boire la tasse. Je constatai avec surprise que l'eau était salée ! Je sortis la tête brusquement et inspirai une grande goulée d'air. Il était fortement iodé. À l'évidence, je dérivais sur la mer, accroché à une planche de bois, le regard fixé sur la lumière clignotante. Le noir était partout, pesant sur mes épaules, oppressant. Je ne quittais pas des yeux le point de lumière. Peu à peu, mon regard s'accoutuma à l'obscurité, et je pus distinguer ce qui m'entourait. Partout, il n'y avait que des vagues, des vagues, des vagues, sur cette mer houleuse et sombre. Un ciel noir, nuageux. Pas de lune. Et cette lueur qui clignotait, à l'horizon. C'était certainement un phare. Je raffermis ma prise sur la planche de bois, et je pris soudain conscience qu'il s'agissait d'un couvercle de cercueil. La peur s'insinua en moi, sournoisement, mordant mon estomac de ses crocs glacés. Un frisson parcourut mon échine, puis un tremblement incontrôlé s'empara de mon corps. Les courants m'entraînaient vers la côte et je restai ainsi, ballotté par les flots, tremblant et transis. Des falaises se dessinèrent bientôt, dressant leurs fiers murs de pierres face à la houle qui venait s'y fracasser dans un sourd vacarme. Au dessus se tenait le phare, seule construction rappelant la présence humaine dans ce paysage sauvage. Sa lanterne tournait, inlassable, dispensant une lumière blême au rythme des vagues. Je heurtai un rocher. Lâchant mon cercueil, je m'agrippai à la pierre mouillée, mes mains glissant sur le lichen et se rattrapant sur les coquillages incrustés dans le récif. Je me hissai à la force des bras et me mis debout sur le rocher, luttant contre les vagues et les embruns qui me fouettaient le visage, menaçant de me faire perdre l'équilibre. Devant moi, un autre récif déchirait la surface des eaux sombres, puis, prête à m'avaler, s'ouvrait la gueule béante d'une grotte. Je sautai de pierre en pierre, manquai de glisser, me rétablis de justesse et atteignis l'entrée de la grotte. Je me frayai un passage entre stalagmites et stalactites, dangereuse dentition de ce monstre de roche, et regagnai l'obscurité. Mais toujours, dans le noir, brillait une petite lueur. Celle-ci provenait d'une bougie, posée sur la première marche d'un escalier en colimaçon remontant vers la surface. Je l'empruntai en tremblant, mes vêtements trempés collés à ma peau, mes cheveux plaqués à mon visage me retombant dans les yeux, mes mains engourdies par le froid. Seules la peur et la quête d'un peu de chaleur me poussaient vers le phare. Je finis par déboucher dans une pièce circulaire vide de tout meuble. Dans une cheminée, un feu crépitait tristement, lançant des ombres lugubres sur les murs. Un nouvel escalier accroché à la paroi s'élevait vers l'étage supérieur d'où émanait un halo de lumière. Comme attiré par cette lueur qui défiait la pénombre, je grimpai les marches à la hâte pour atteindre le palier. La lumière filtrait à travers une porte entrebâillée donnant sur la lanterne. Retenant mon souffle, je poussai le battant. Aussitôt, la blancheur éclatante et absolue m'éblouit, brouillant ma vision de larmes salées. Lorsque j'eus recouvré la vue, je restai ébahi, le souffle coupé, touché en plein cœur. Puis je tombai à genoux. Devant moi se tenait une femme magnifique, debout près de la fenêtre et contemplant la mer. Elle était grande et pâle, son visage serein encadré d'une cascade de boucles dorées descendant jusqu'au milieu de son dos. Son front haut faisait transparaître la fierté, ses yeux verts tels deux émeraudes scintillantes inspiraient la douceur, et ses lèvres rappelaient la pureté d'un bouton de rose. Elle portait une longue robe blanche, le tissu léger épousant à la perfection sa silhouette fine et élancée, et si un diadème avait ceint son front, on l'aurait assurément prise pour une reine issue d'un conte de fée. Subjugué, je restai à genoux à la contempler, incapable du moindre mouvement, de la moindre parole. C'était la première fois que je revoyais ma mère depuis qu'elle était morte, quelques semaines plus tôt. - Mathéo... murmura-t-elle en tendant ses doigts vers mon visage. Ne pleure pas... Je m'aperçus que j'avais éclaté en sanglots et que des perles salées roulaient sur mes joues. - Maman... Mué par une impulsion soudaine, je me jetai à son cou. - Qu'est-ce que... ? Comment... ? Je... je... Elle me fit taire en posant tendrement un index sur mes lèvres. Nous restâmes enlacés un moment, en silence, chacun savourant la présence de l'autre, mais elle dût sentir mon étonnement car elle finit par s'écarter de moi. - Tu te poses des questions, mon fils. Puis-je essayer d'y apporter des réponses ? Hésitant, mi-angoissé mi-étonné à l'idée de sa réponse, je lui demandai si elle était morte. À ma grande surprise, elle éclata de rire. - Oui, bien sûr ! Je suis morte ! Tu étais là quand c'est arrivé, tu te rappelles ? Évidemment, je me rappelais. Comment aurais-je pu oublier ? Sa réponse entraînant une autre question, je lui demandai alors comment il se faisait que nous soyons réunis, et surtout quel était cet endroit. Elle m'expliqua que nous nous trouvions à la lisière entre le monde des morts et celui des vivants. Le phare était la frontière, et elle, avait été chargée d'effectuer certains passages. - Lorsque la personne qui arrive est une connaissance, je l'accueille, pour que le transfert de son âme s'opère plus sereinement. Les morts sont rarement résolus à leur sort, ils s'accrochent à la vie, ils arrivent ici en émoi, apeurés, refusant de coopérer. Alors s'ils retrouvent une autre âme connue, ils s'apaisent et acceptent de partir vers l'autre monde plus facilement. - Mais moi... je suis bien réel, regarde ! Qu'est-ce que je fais ici ? - Qui t'a dit que les âmes n'étaient pas réelles, mon fils ? Mathéo, tu as bu une infusion avant de te coucher. Je t'ai vu. J'acquiesçai en silence. Je commençais à comprendre. - Qu'y avait-il dedans ? Arsenic ? Curare ? - Verveine, pavot et ciguë, répondis-je en tremblant, plus si sûr désormais d'avoir fait le bon choix. Le visage de ma mère s'assombrit, et je crus même discerner l'ombre de la peur sur ses traits soudainement tirés. - Pourquoi ? chuchota-t-elle, et sa voix me donna un frisson. Pourquoi avoir décidé de te tuer ? Perdant toute contenance, je lui racontai que j'avais été désespéré par sa mort et que je n'aspirais qu'à la suivre, que la vie sans elle n'avait pas de sens, pas de couleur, pas de parfum, que j'avais vu la mort comme la seule délivrance possible à cet enfer. Une larme traça un sillon clair sur ma joue sale. Maman l'essuya de son index, puis son doigt alla relever mon menton. Elle planta son regard dans le mien. - Mon fils, je suis partie, c'est un fait. Partie dans un endroit où tu ne peux me rejoindre. Où je ne veux pas que tu me rejoignes. Je suis partie en espérant que toi tu resterais, que tu resterais longtemps et que tu pourrais être heureux. Je pensais te connaître... S'il te plaît, ne me fais pas souffrir davantage. Je t'aime, Mathéo, tu le sais mieux que quiconque, et je sais que mes sentiments sont réciproques. Au nom de cet amour, ne t'infliges pas la douleur de mourir sans avoir vécu. Ne te l'inflige pas. Ne me l'inflige pas. - Mais il est trop tard, rétorquai-je, refluant mes larmes, je suis déjà mort... En voyant la tristesse de maman, je m'en voulais, à présent. Je n'avais pas pensé à elle, ni même à mon père et aux amis que j'avais laissés derrière moi. Pourtant, j'étais le mieux placé pour connaître la douleur que cause la mort subite d'un être cher, mais j'avais agi en égoïste, aveuglé par ma propre douleur, noyé dans ma propre peine. Mais être là, près de maman, si belle et si pleine de santé, libéré de cette solitude si dure à supporter... Être près d'elle pour l'éternité, et retrouver les autres à leur mort dans quelques années... - Il n'est jamais trop tard, Mathéo, reprit ma mère. Tu n'es encore qu'à la frontière entre les mondes. Ton âme et ton corps peuvent encore se réunir et fusionner. Tu peux encore retourner auprès des tiens. - Mais c'est toi, les miens ! m'écriai-je, en détresse comme un petit enfant perdu dans une foule. Je ne t'abandonnerai pas, maman. Jamais. Un sourire mélancolique étira son visage triste, si pur. - Je ne te demande pas de m'abandonner, ni de m'oublier, mon fils. Je te demande simplement de vivre du mieux possible, de profiter de l'existence autant que tu le pourras, et même de profiter deux fois plus pour pouvoir partager avec moi qui n'en ai pas eu le temps. Je te regarderai en permanence, Mathéo. Et où que tu ailles, je serai avec toi. Là. Elle posa une main sur ma poitrine. Sa voix tremblait d'émotion lorsqu'elle chuchota à mon oreille : - C'est à moi de te dire que je ne t'abandonnerai jamais. Pas à toi. Son souffle tiède apaisa mon cœur tiraillé. Chaque phrase, chaque mot qu'elle prononçait s'inscrivait en moi et se gravait à jamais dans ma mémoire, et je ne pouvais m'empêcher de la croire. Chaque parole semblait comme une promesse absolue de bonheur et de quiétude, comme un onguent miraculeux refermant mes plaies à vif, appelant ce sentiment bienfaisant dont j'avais presque oublié l'existence, et qu'était la sérénité. Ma respiration s'était calmée, redevenue lente et régulière, et lorsque je parlai, ce fut d'une voix assurée. - D'accord. Je suis d'accord pour retourner près des vivants. Je mènerai ma vie longtemps pour rembourser la tienne, j'acquerrai de l'expérience, des connaissances et assez de savoir pour remplir les deux cœurs qui battront dans ma poitrine, et lorsque je serai trop sage et trop ridé pour continuer à exister, je viendrai vous rejoindre, toi et papa, et nous seront réunis à jamais. Maman ébouriffa mes cheveux humides, comme elle le faisait souvent quand j'étais petit. Elle sourit de nouveau, et pour la première fois, elle sembla heureuse. - Tourne-toi, Mathéo. Je m'éxécutai. Deux grandes portes blanches me faisaient face, au beau milieu de la pièce, ne donnant apparemment que sur du vide. Celle de droite était fermée par une chaîne et un verrou d'argent scintillant, mais maman tira de son corsage une clef du même métal et me la tendit. - Ouvre l'Arche de Vie, mon fils, retourne dans le monde auquel tu appartiens. Elle m'embrassa tendrement sur le front. Je l'étreignis, me délectant des derniers instants irréels passés en sa compagnie si improbable, puis, prenant délicatement la clef d'argent, je me dirigeai vers l'Arche. Comme dans un rêve, je fis jouer le loquet, entendis un léger déclic, puis la porte s'ouvrit, libérant une lumière blanche, pure, intense et éblouissante. Sa force semblait m'aspirer à elle, et, la vue brouillée par la clarté, je me laissai doucement emporter vers un autre univers. Le son cristallin de la voix de maman parvint à mes oreilles, m'ordonnant de vivre. Je me sentis tomber, tomber, tomber... Puis, le néant. Je me réveillai en sursaut dans mon lit, trempé de sueur, la vue brouillée par la fièvre, l'estomac retourné comme s'il avait voulu s'enfuir de mon corps. Je me retournai par-dessus le bord du lit et je vomis un mélange de bile et de substance filandreuse sentant la verveine et un autre parfum que je fus incapable d'identifier. Après quoi, mon malaise décrut et ma vue s'améliora, l'ampoule de guirlande qui semblait clignoter un instant auparavant se stabilisa, et je retrouvai ma chambre telle que je l'avais quittée avant de m'endormir, avec la tasse vide posée sur la table de chevet. Il faisait toujours noir, mais étrangement cette obscurité ne me terrorisa pas. Je la considérai avec détachement, et elle me sembla tout simplement... naturelle. Mais peut-être était-ce un effet de la fièvre. Un autre effet de la fièvre était que je ne sentais plus le froid qui m'avait tant torturé quelques heures plus tôt. À cet instant, j'avais plutôt l'impression de ressortir droit de la bouche des enfers, le sang en ébullition, le corps inondé de transpiration. J'avais fait un rêve. Quel merveilleux rêve ! Encore si proche dans ma mémoire, si réel, si angoissant et pourtant si beau... J'avais vu maman, n'était-ce qu'en rêve, mais cette rencontre me transportait de joie. Soudain, je pris conscience d'un objet frais sur ma poitrine brûlante, un objet qui paraissait chasser la fièvre pour faire redescendre la température de mon corps à un niveau raisonnable. Repoussant les couvertures, je portai la main à mon torse. Je me figeai, stupéfié. Sous mes doigts reposait une petite clef d'argent, pendue à mon cou par une chaînette du même métal. La clef que ma mère m'avait offerte pour mon quinzième anniversaire, le dernier passé avec elle, le plus beau cadeau que j'aie jamais reçu. La clef que j'avais jetée dans son cercueil à son enterrement, un dernier hommage à cette femme que j'avais tant aimée, qui aurait dû désormais reposer sous terre avec elle. La clef du bonheur dont je ne voulais plus, et qui m'avait retrouvé. FIN | |
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